1. Comment savoir si j’effectue de l’encaissement pour compte de tiers ?
Dès lors que les sommes encaissées sur un compte ne constituent pas le versement d’un paiement dont je suis le seul bénéficiaire (par exemple : paiement du prix de vente d’un service que je fournis, paiement d’une commission qui m’est due, etc.) et que j’ai l’obligation de reverser tout ou partie de cette somme à un tiers bénéficiaire du paiement, j’interviens dans le cadre de l’exécution d’une opération de paiement entre le payeur et le bénéficiaire du paiement.
Pour qu’il y ait encaissement pour compte de tiers, il faut donc :
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qu’il y ait « encaissement de fonds », ce qui est le cas chaque fois que des fonds sont collectés ou réceptionnés sur un compte ouvert en mon nom auprès d’un prestataire de services de paiement (« PSP ») ou d’un émetteur de monnaie électronique,
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que tout ou partie de ces fonds soient encaissés « pour le compte d’un tiers », ce qui est le cas lorsque je reçois ces fonds dans le but de les reverser à leur véritable bénéficiaire.
Quelques illustrations :
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Les places de marché sur Internet, qui mettent en relation un acheteur et un vendeur et qui interviennent comme « intermédiaire de confiance » pour sécuriser et fluidifier l’opération de paiement. La place de marché reçoit le paiement de l’acheteur (qu’elle reverse au vendeur) d’un bien qu’elle ne vend pas, dont elle n’est pas propriétaire, qu’elle n’a pas dans ses stocks et qu’elle n’expédie pas.
Nota bene : l’activité d’encaissement de fonds pour le compte d’un marchand localisé en dehors de l’Union Européenne relève uniquement de la règlementation du pays où ce marchand opère ; -
Les organismes de tiers payant qui collectent auprès des assurés ou de leurs employeurs les cotisations dues aux Assureurs Maladie Complémentaires (ACM) et règlent pour le compte des AMC le prix des prestations ou produits de santé du à un professionnel de santé ;
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Les programmes de fidélisation ou de cashback dès lors qu'ils impliquent l’encaissement des fonds rétrocédés par les marchands pour le compte du client ;
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Transmission de fonds.
Lorsque j’encaisse des fonds pour compte de tiers, cela n’implique pas systématiquement l’ouverture de comptes de paiement au nom de mes clients.
2. Quelle qualification juridique retenir pour l’activité d’encaissement pour compte de tiers ?
L’encaissement de fonds pour compte de tiers désigne une activité et ne constitue pas, en tant que telle, une qualification juridique. La détermination du ou des services dont relève cette activité dépendra de la manière dont l’activité est organisée dans la chaîne de paiement.
De quels services de paiement peut relever l’activité d’encaissement pour compte de tiers ?
Le modèle classique d’encaissement de fonds pour compte de tiers ou d’acquisition des paiements (marketplace, plateforme de financement participatif, etc.) comprend le service 5 « acquisition d’opérations de paiement » et le service 3c (« virement ») :
Service de paiement 5° |
Exemples de cas d'usage |
5a - Acquisition d’opérations de paiement : Acceptation et traitement des opérations de paiement pour le compte du bénéficiaire (le prélèvement étant un service exécuté pour le compte du bénéficiaire qui emporte déjà l’encaissement des fonds, il n’est pas visé par ce service de paiement), de telle sorte que les fonds soient transférés au bénéficiaire. |
Acceptation et encaissement des fonds pour le compte du bénéficiaire du paiement (un vendeur sur une place de marché par exemple), que l’opération soit effectuée par carte ou tout autre dispositif similaire, virement, etc. |
Remarque : le service 5a inclut notamment l’émission d’une carte de paiement. Cependant, la définition de l’instrument de paiement (L. 133-4 du CMF) étant plus large, cette dernière peut inclure d’autres dispositifs de paiement. La mise à disposition des fonds implique que le montant de l’opération de paiement soit disponible pour le bénéficiaire immédiatement après que ces fonds ont été crédités sur le compte du PSP. |
Service de paiement 3° |
Exemples de cas d'usage |
Exécution d’opérations de paiement associées à un compte de paiement (un compte de paiement est un compte détenu au nom d'une ou de plusieurs personnes, utilisé aux fins de l'exécution d'opérations de paiement (article L. 314-1,I du Code monétaire et financier). |
Paiements par carte ou au moyen d’un dispositif similaire, virements et prélèvements. |
3c - Virement : service de paiement fourni par le prestataire de services de paiement qui détient le compte de paiement du payeur et consistant à créditer, sur la base d’une instruction du payeur, le compte de paiement d’un bénéficiaire par une opération ou une série d’opérations de paiement réalisées à partir du compte de paiement du payeur. | Exécution de virement par le débit du compte de paiement, exécution des opérations de paiement précitées sur une base récurrente ou unitaire. Par exemple, lorsque le vendeur obtient le reversement des fonds disponibles sur son compte ouvert de la place de marché par virement sur son compte de paiement. |
Le modèle d’activité consistant à transférer des fonds vers un pays étranger (hors zone euro) comprend le service 6 de « transmission de fonds » :
Service de paiement 6° |
Exemples de cas d'usage |
Transmission de fonds : service de paiement pour lequel les fonds sont reçus d’un payeur, sans création de comptes de paiement au nom du payeur ou du bénéficiaire, à la seule fin de transférer un montant correspondant vers un bénéficiaire ou un autre prestataire de services de paiement agissant pour le compte du bénéficiaire, et/ou pour lequel de tels fonds sont reçus pour le compte du bénéficiaire et mis à la disposition de celui-ci (à noter que l’agrément simplifié ne permet pas d’exécuter des opérations de transfert de fonds). |
Transmission de fonds sans recours à un compte de paiement. |
Remarques :
Ce service est fourni à la seule fin de transférer des fonds du payeur vers le bénéficiaire sans création de compte de paiement.
L’absence de compte de paiement ne signifie pas que cette opération ne peut être exécutée qu’à partir d’un paiement en espèces.
En effet, rien ne s'oppose à ce que les fonds soient versés par le payeur au PSP transmetteur au moyen d'une opération de paiement par carte ou d'un virement. Rien ne s’oppose également à ce que les fonds soient mis à disposition du bénéficiaire via le correspond local du PSP transmetteur.
Lorsque le PSP transmetteur de fonds recourt à ou plusieurs partenaires locaux, les dispositions sur la correspondance bancaire transfrontalière s’appliquent généralement. Pour plus de détails, voir les Principes d’application sectoriels sur la correspondance bancaire élaborés par l’ACPR PAS.
3. Qui peut exercer une activité d’encaissement pour compte de tiers ?
Les prestataires de services de paiement (« PSP »)
La fourniture à titre de profession habituelle de services de paiement est réservée aux seuls prestataires de services de paiement qui sont : les établissements de paiement, les établissements de monnaie électronique, les établissements de crédit (article L. 521-1 du Code monétaire et financier).
Nota bene : les établissements de paiement agréés uniquement pour fournir le service d’initiation de paiement ainsi que les prestataires de service d’information sur les comptes (PSIC ou « agrégateur ») ne peuvent pas procéder à de l’encaissement pour compte de tiers.
Les agents mandatés par un PSP
Un agent est un mandataire qui n’a pas besoin d’être agréé par l’ACPR, mais qui doit faire l’objet d’un enregistrement obligatoire auprès de l’ACPR.
Quelques régimes d'exception
Certaines professions sont autorisées par des textes sectoriels spécifiques à encaisser des fonds pour compte de tiers. C’est le cas notamment des avocats, des notaires, des agents immobiliers, des intermédiaires en assurance, des intermédiaires en opérations de banque et services de paiement (IOBSP) ou encore des agents de voyage.
L’exception dite « agent commercial » (3° du III de l’article L. 314-1 du Code monétaire et financier). Ce régime permet à un intermédiaire d’encaisser des fonds pour le compte de tiers sous réserve du respect des trois conditions suivantes (conditions cumulatives) :
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il intervient dans la réalisation d’une opération de vente ou d’achat de biens ou de services ;
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il agit pour le compte du payeur ou du bénéficiaire uniquement ;
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il a la capacité de négocier ou de conclure le contrat de vente pour le compte du mandant.
Les plateformes mettant en relation des acheteurs et des marchands n’ont généralement pas la capacité de négocier ou de conclure un contrat de vente. Elles ne peuvent donc pas être des agents commerciaux si elles se bornent à fournir des services de paiement sans agir, soit pour le compte du payeur soit pour celui du bénéficiaire, pour négocier ou conclure le contrat de vente.
Certains modèles d’affaires peuvent bénéficier d’une exemption d’agrément pour la fourniture de moyens de paiement utilisés au sein d’un réseau limité d’accepteurs ou pour l’acquisition d’un éventail limité de biens ou de services. La position 2022-P-01 de l’ACPR apporte plus de précisions sur les notions « d’éventail limité de biens et services » et « de réseau limité d’accepteurs ».
Mise à jour le 2 Janvier 2025