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Crédit à la consommation : enseignements de l’enquête de l’ACPR sur la gestion des impayés et le recouvrement amiable
Mise en ligne le 13 Juin 2024
L’ACPR a réalisé en 2023 une enquête par questionnaire sur la gestion des impayés, le recouvrement amiable et la cession des créances résultant des crédits à la consommation. L’enquête, adressée à dix établissements (7 établissements de crédit et 3 sociétés de financement représentant près de 40 % des parts de marché des crédits à la consommation), avait pour objectif d’évaluer les conditions dans lesquelles les établissements accompagnent les débiteurs et tentent de recouvrer leurs créances, directement ou non, et, dans certains cas, les cèdent à un tiers.
Il en ressort que les pratiques sont globalement satisfaisantes lors de la phase d’accompagnement du débiteur par le prêteur, mais les intérêts de la clientèle pourraient être mieux pris en compte en phase de recouvrement et en cas de cession de créances prescrites.
Données chiffrées
Cette enquête a mis en évidence une hausse du montant des crédits à la consommation en cours de remboursement entre 2021 et 2022 (+ 5,9 %, de 42,5 à 45 milliards d’euros), associée à une augmentation encore plus importante du montant des impayés (+ 19 %, de 493 à 587 millions d’euros). Les suites de ces impayés évoluent également défavorablement avec un taux de régularisation en forte baisse, passant de 59 % à 53,6 %, et une augmentation de 31 % du montant des créances avec déchéance du terme (de 450 à 590 millions d’euros, soit de 1,1 à 1,3 % des crédits en cours).
L’accompagnement du débiteur
Dès le premier impayé, le prêteur doit informer le débiteur par écrit des risques encourus en cas de défaillance (Article L. 312-36 du code de la consommation). Cette information est souvent insuffisante (mention des risques en note de bas de page dans une petite police de caractères, référence à des dispositions légales abrogées) ou envoyée tardivement. En outre, le plus souvent, le prêteur n’indique pas avec précision le détail de la somme à recouvrer.
Toutefois, certaines pratiques sont à encourager. Ainsi, une part importante des établissements interrogés informe le débiteur en utilisant plusieurs canaux de communication (courriel, SMS, téléphone) et en mentionnant clairement les modalités de régularisation des impayés (par virement, chèque, carte, courrier, sur Internet ou par téléphone). Par ailleurs, tous les établissements interrogés proposent des mesures d’accompagnement du débiteur, telles que le changement de la date de prélèvement sans frais, la réintégration des impayés dans le capital, le report d’échéances, l’octroi ou l’augmentation d’une autorisation de découvert ou le réaménagement de crédits.
Le recouvrement amiable
Effectué directement par l’établissement prêteur :
La quasi-totalité des établissements interrogés dispose en interne d’unités spécialisées dans le recouvrement de créances.
Certains prêteurs indiquent procéder lors de la phase dite « amiable » jusqu’à trois voire cinq relances téléphoniques par jour. Seul un établissement précise dans sa charte de bonne conduite les limiter à une par jour « pour ne pas faire de harcèlement ».
L’ensemble des établissements prêteurs déclare ne pas facturer de frais de recouvrement conformément à l’article L. 121-21 du code de la consommation, mais facture généralement des pénalités de retard en respectant les maximas prévus par l’article L. 312-39 du même code.
Avant de prononcer la déchéance du terme, les établissements prêteurs doivent adresser au débiteur une lettre de mise en demeure mentionnant le délai de régularisation. La grande majorité des établissements s’acquittent de cette obligation, parfois sous la forme d’un recommandé. Toutefois, cette information manque souvent de clarté : le délai de régularisation est mentionné sans indication du point de départ ; les éléments de la somme à recouvrer sont insuffisamment détaillés, seul un tiers des établissements précisant l’ensemble des éléments de la somme à recouvrer (type de crédits, échéances, intérêts, pénalités).
Externalisé auprès de prestataires :
La majorité des établissements interrogés fait appel à des sociétés de recouvrement spécialisées et parfois aux services de commissaires de justice.
Alors que la part variable de la rémunération des collaborateurs chargés du recouvrement est assez faible dans les établissements interrogés (4 à 5 % de la rémunération totale), celle des agents des prestataires peut être considérable (de plusieurs centaines d’euros par trimestre à 20 % à 30 % de la rémunération totale, voire 70 %) et n’est pas suffisamment prise en considération par les établissements prêteurs. Il est donc nécessaire que les établissements vérifient que les modalités de rémunération de leurs prestataires ne conduisent pas à des démarches de recouvrement trop agressives.
Le contrôle des prestataires s’effectue selon des formes et des fréquences variables. Une partie des établissements indique que ces contrôles peuvent donner lieu des actions correctives, voire à la cessation des relations. Certains établissements interrogés indiquent par ailleurs avoir formé leurs prestataires en matière d’entretiens téléphoniques, d’accueil et de suivi.
La cession de créances
La quasi-totalité des établissements interrogés procède à des cessions de créances, portant en général sur des créances « passées en pertes », c’est-à-dire prescrites ou forcloses et dont le recouvrement judiciaire n'est plus possible. Le recouvrement de telles créances, nécessairement amiable, est susceptible de donner lieu à des pratiques commerciales trompeuses lorsque le débiteur est menacé de poursuites judiciaires que le créancier n'est plus en droit de mener. Cependant, seul un établissement a indiqué que cette cession s’effectuait en fonction de critères permettant de mieux protéger sa clientèle– les créances de faible montant ou appartenant à des emprunteurs vulnérables (âgés, en surendettement) n’étant pas cédées.
Par ailleurs, il ressort de l’enquête que les emprunteurs sont parfois avertis tardivement de la cession de leur dette.
Enfin, les échanges d’informations avec les cessionnaires relatifs aux régularisations entraînent dans certains cas des retards de radiation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP). L’un des établissements interrogés a en outre déclaré ne pas disposer de procédure prévoyant l’information du cédant en cas de régularisation.
Synthèse des principaux enseignements
Mises en conformité attendues :
-
indiquer clairement dans les notifications envoyées les risques encourus et mettre à jour les références aux dispositions légales ;
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envoyer une lettre de mise en demeure avant toute déchéance du terme en mentionnant un délai précis de régularisation ;
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lorsqu’une cession est envisagée, informer rapidement l’emprunteur ;
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prévoir des échanges d’information systématiques avec le cessionnaire pour éviter des retards de transmission des demandes de radiation du FICP.
Axes d'amélioration :
-
compléter les demandes de régularisation en précisant notamment le délai et les sommes dues, les envoyer le plus rapidement possible après le premier impayé et renforcer l’information par d’autres canaux de communication (SMS, courriel, appel) ;
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analyser systématiquement les raisons de l’impayé et proposer la plus vaste gamme possible de mesures (report, réaménagement, octroi de découvert, etc.) ;
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limiter les relances téléphoniques ;
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faciliter les régularisations en autonomie (sans l’intervention d’un conseiller) ;
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envoyer les mises en demeure par LRAR (dématérialisée si possible et avec l’accord de l’emprunteur) et y détailler les caractéristiques de l’impayé et du crédit concerné ;
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limiter les frais de retard appliqués dans certaines circonstances (petits montants, clients vulnérables) ;
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renforcer et rendre plus fréquent le contrôle des prestataires mandatés par les établissements prêteurs ;
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vérifier la régularité des pratiques commerciales des cessionnaires avant de leur céder des créances.
Rappel de principe et application générale au marché
Il est rappelé que les différents points de non-conformité mentionnés ci-dessus sont susceptibles de concerner d’autres établissements que ceux interrogés dans le cadre de l’enquête réalisée par l’ACPR et que, le cas échéant, des corrections devront être apportées au plus vite.
En outre, cette enquête a également permis de constater la mise en place de pratiques commerciales vertueuses par certains établissements, dont le déploiement au sein de l’ensemble des établissements prêteurs serait bénéfique à la clientèle. Ainsi, tous les établissements sont encouragés à adopter ces pratiques et axes d’améliorations.
Mise à jour le 4 Septembre 2025