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Mise en ligne le 5 Juillet 2024
L’intelligence artificielle connaît aujourd’hui un développement accéléré dans l’industrie financière. Cette technologie constitue une innovation de rupture, porteuse d’opportunités mais aussi de risques pour le secteur financier. Cette dualité vaut également pour l’ACPR, qui doit tout à la fois se préparer à contrôler l’usage des algorithmes, tout en tirant parti des possibilités qu’offre la technologie pour développer une supervision « augmentée ».
Pour un superviseur, l’intelligence artificielle (IA) mérite une attention particulière car son impact est ambivalent : l’IA est source d’opportunités pour le secteur financier – de même que pour l’ACPR – et, dans le même temps, elle constitue un nouveau vecteur de risques, pour les institutions financières et leurs consommateurs (risques micro-prudentiels), mais aussi pour le système financier dans son ensemble (risques macro-prudentiels).
L’ACPR doit se préparer à contrôler l’usage de l’IA dans le secteur financier
Ces risques justifient l’encadrement réglementaire de l’IA qui vient d’être engagé : avec son règlement sur l’IA (« AI Act »), en cours d’adoption, l’Union européenne se dote du premier instrument législatif au monde et pose les bases d’une « IA de confiance ». Le règlement distingue ainsi plusieurs niveaux de risque, parmi lesquels les systèmes dits à « haut risque » qui constituent le cœur du texte et concernent le secteur financier à au moins deux titres : l’évaluation de la solvabilité pour l’octroi de crédit à des personnes physiques ; l’évaluation et la tarification en assurance maladie et en assurance-vie. Ces systèmes à risque élevé devront respecter un certain nombre d’exigences (entraînement sur des données de haute qualité, transparence, contrôle humain…). Le texte confie à des « autorité de surveillance du marché » la mission de contrôler l’application du règlement. Pour le secteur financier, ce rôle est confié au superviseur prudentiel – donc à l’ACPR (y compris pour les banques de taille significative, la BCE ayant indiqué que cette mission ne pouvait entrer dans son mandat). L’essentiel des dispositions du règlement entreront en vigueur autour de mi-2026.
L’ACPR doit donc se préparer à exercer ces nouvelles missions, rendues nécessaires par l’accroissement de l’usage de l’IA dans le secteur financier. Or, contrôler efficacement les systèmes d’IA suppose, en premier lieu, d’acquérir une bonne maîtrise de la technologie. En plus de se doter des compétences adaptées, l’ACPR aura besoin de développer une méthodologie ad-hoc pour l’audit des systèmes d’IA. Dans cette perspective, le Pôle Fintech-Innovation a récemment lancé un programme de travail sur l’audit des algorithmes, qui prolonge les travaux menés au cours des années précédentes.
En second lieu, l’ACPR doit communiquer sur ses attentes et exigences auprès du secteur financier. Dans des discours récents, le Gouverneur et le Premier Sous-Gouverneur ont fait la part des opportunités et des risques liés au déploiement de l’IA dans le secteur financier, mais aussi dans nos métiers :
- F. Villeroy de Galhau, L’innovation par les banques centrales : le plus tôt est le mieux (discours au BIS Innovation Summit, 6 mai 2024) ;
- D.Beau, Le superviseur financier et l’IA (discours devant l’Association Europe Finances Régulation, 5 juin 2024).
De même, le Pôle Fintech-Innovation a participé au cours des derniers mois à plusieurs conférences et séminaires organisés par le secteur privé, afin de faire part des attentes du superviseur dans le domaine.
L’IA constitue aussi une opportunité pour « augmenter » notre supervision
Dans le même temps, l’ACPR peut tirer parti des avancées technologiques pour augmenter ses capacités d’analyse et gagner en efficacité dans l’exercice de ses missions. C’est tout le sens de la démarche « SupTech » que conduit le Pôle Fintech-Innovation en collaboration avec les services informatiques de l’ACPR et de la Banque de France. Parmi les projets déjà développés à l’ACPR, on peut citer la détection avancée d’anomalies dans les reportings des établissements, ou encore l’outil LUCIA, qui permet d’évaluer la performance des modèles de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT), déployés dans les banques via l’analyse de grands volumes d’opérations bancaires.
Très récemment, l’ACPR a organisé, avec l’aide du Lab de la Banque de France, un « SupTech Sprint » ou « hackathon » (compétition d’innovation sur un thème donné, organisée sur une durée définie), destiné à explorer ce que l’IA générative peut apporter aux différents métiers du superviseur. En trois jours, cet événement a permis de révéler le potentiel des « grands modèles de langage » (LLM) pour la supervision, avec huit prototypes co-construits par des data scientists externes et des agents de l’ACPR. Quatre projets feront d’ailleurs l’objet d’approfondissements dans le cadre de notre plan stratégique, afin d’aider les contrôleurs dans leurs activités quotidiennes. Ce Tech Sprint a en outre permis de poser les premiers jalons d’une réflexion de plus long terme sur la façon de faire évoluer les métiers du contrôle, et en particulier sur la nécessité de toujours réserver une part de l’analyse aux contrôleurs humains, afin de maintenir un très haut niveau de fiabilité dans nos processus.
Enfin, notons que, loin de s’y opposer, la démarche SupTech complète et renforce la préparation de l’Autorité au contrôle des algorithmes d’IA du secteur financier. Elle permet en effet à l’ACPR d’améliorer sa maîtrise de la technologie sous-jacente, en vertu du principe que c’est en faisant soi-même qu’on apprend le mieux.
Pour en savoir plus sur les travaux du Pôle Fintech-Innovation
Mise à jour le 4 Septembre 2025