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N° 160 : Le financement de l'habitat en 2023
Dans le contexte de poursuite de la remontée des taux d’intérêt, le marché de l’immobilier français a poursuivi son repli en 2023.
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Entre le quatrième trimestre 2022 (T4 2022) et le T4 2023, l’indice INSEE des prix dans l’ancien a reculé de 3,9 % en métropole (contre une hausse de 4,5 % en 2022), avec des divergences d’amplitude entre la Province (-2,9 %) et l’Île-de-France (-6,9 % ; Graphique 1) tandis que le nombre de transactions annuelles s’est établi à 869 000, un chiffre en baisse de 22 % par rapport à 2022 (Graphique 2) ;
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la majeure partie de la hausse des taux de marché s’est répercutée sur les taux des crédits à l’habitat, qui ont atteint 4,04 % en décembre 2023 (+1,92 pt par rapport à décembre 2022), leur plus haut niveau depuis mars 2012 (Graphique 4). Ils demeurent néanmoins plus bas en France que dans les autres principaux marchés de la zone euro (Graphique 3) ;
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la production annuelle de crédits à l’habitat s’est élevée à 152,9 milliards d’euros en 2023, soit une baisse de 41,1 % par rapport à 2022 (Graphique 6), retrouvant ainsi les niveaux observés en 2014 / 2015 avant la période de taux exceptionnellement bas ;
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hors rachats et renégociations, la production de nouveaux crédits a atteint 128,6 milliards en 2023, un chiffre en baisse de 40,9 % par rapport à 2022. Rapportée au Produit Intérieur Brut, la production de crédits à l’habitat en France en 2023 demeure néanmoins supérieure à celle de la moyenne de la zone euro (5% vs. 3,5% ; Graphique 8) ;
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la part des rachats et renégociations dans la production est restée quasiment stable (15,9 %, - 0,2 pt par rapport à 2022 ; Graphique 9) ;
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la hausse de la part des prêts relais (+0,7 pt à 7,3 %) s’est poursuivie (Graphique 14), avec notamment une hausse des prêts prorogés (Graphique 15) ;
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les encours de prêts à l’habitat en France ont enregistré une croissance de 0,9 % sur l’année, contre 5,5 % un an plus tôt (Graphique 10), tandis que l’ensemble des crédits aux particuliers résidant en France progressaient de 1,2 % ;
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enfin, les prêts ayant pour objet l’acquisition d’une résidence principale restent largement prédominants : ils ont représenté 78,9 % des nouveaux crédits (hors prêts relais) en 2023, en hausse de 2,4 pts par rapport à 2022, du fait de l’augmentation de la part des prêts aux primo-accédants (+3,5 pts à 42,6 % ; Graphique 12).
Le début de l’année 2024 est marqué par des évolutions plus favorables. L’ajustement des prix de l’ancien en France métropolitaine se poursuit (-5,2 % entre le T1 2023 et le T1 2024). Les taux d’intérêt des nouveaux crédits à l’habitat s’inscrivent en nette baisse (3,83% en mai 2024, en repli de 0,34 pt par rapport au point haut atteint en janvier 2024) en parallèle d’un redémarrage progressif de la production de nouveaux crédits à l’habitat à partir du mois d’avril.
Le niveau d’endettement des ménages français décroit pour la première fois depuis près de 25 ans mais se maintient à un niveau élevé et supérieur à ceux des autres pays européens : en décembre 2023, il atteint 97 % du revenu disponible brut (Graphique 21), un chiffre en baisse de 5 pts par rapport à décembre 2022 mais qui reste nettement supérieur à la moyenne de la zone euro (88 %), laquelle recule d’ailleurs plus rapidement (-5,9 pts par rapport à décembre 2022).
Les évolutions de ce niveau d’endettement comme le relâchement des conditions d’octroi ont motivé le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) à transformer, à partir de janvier 2022, la recommandation émise fin 2019 en une norme macro-prudentielle contraignante. Cette mesure a permis d’améliorer plusieurs facteurs de risque mesurés à l’octroi. Les données collectées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) montrent en effet que la part des crédits les plus risqués dans la production nouvelle se maintient à des niveaux inférieurs à ceux observés en 2020 :
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la part des prêts aux ménages dont le taux d’effort excède 35 % s’élève à 14 % en 2023, un pourcentage en légère hausse de 0,3 pt par rapport à 2022 mais toujours très inférieur au niveau observé en 2020 (29,3%) (Graphique 35) et ce malgré la hausse des taux d’intérêt ;
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la part des prêts dont la maturité excède 25 ans s’élève à 6,7 % en 2023, un pourcentage en légère hausse de 0,7 pt par rapport à 2022 mais toujours nettement inférieur au niveau observé en 2020 (10,7%) (Graphique 29).
Par ailleurs, ces évolutions sont allées de pair avec une baisse de la part des crédits dont le rapport entre le montant de prêt et la valeur du bien financé à l'octroi (loan to value ou LTV) excède 100 % : à 16,6 % fin 2023, cet indicateur s’affiche en baisse de 6,3 pts par rapport à 2022 et de 12,4 pts par rapport à 2020 (Graphique 43).
Ainsi, la part des prêts qui dépassent les seuils fixés par la décision du HCSF s’élevait globalement à 15,4 % au T4 2023, un pourcentage nettement inférieur à la marge de flexibilité de 20 % admise par la décision (Graphique 45).
Les critères d’octroi moyens des nouveaux crédits accordés en 2023 présentent en outre les caractéristiques suivantes (données annuelles) :
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Le montant moyen des prêts a reculé de 6,3% sur un an pour atteindre 196 800 euros (Graphique 22), reflétant la baisse de la capacité d’emprunt d’une partie des emprunteurs.
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La durée moyenne s’est stabilisée, avec une légère hausse de 1,8 mois à 22,3 ans, (Graphique 25).
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Le taux d’effort moyen a augmenté, de 0,7 pt à 30,7 % (Graphique 31), traduisant la progression de la charge d’intérêt.
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La baisse du montant moyen des prêts, combinée à la stabilisation de la durée moyenne, se traduisent par une baisse assez nette du taux d’endettement (-6 mois à 4,6 années de revenus), cet indicateur n’intégrant toutefois pas la charge d’intérêt (Graphique 36).
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La baisse de la LTV moyenne à l’octroi s’accélère (-4,3 pts à 78,8 %), reflétant une plus forte mobilisation de l’épargne dans le financement des nouvelles opérations (Graphique 39).
Sur les premiers mois de 2024, on observe une poursuite de la baisse du montant moyen de prêt, du taux d’endettement moyen et de la LTV moyenne, tandis que l’évolution des autres indicateurs (durée moyenne, taux d’effort) marque également une inflexion à la baisse. Ainsi, entre le T4 2023 et le T1 2024 (données trimestrielles) :
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Le montant moyen des prêts continue de reculer, de 4,9 % à 175 500 euros.
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La durée moyenne recule légèrement à 22,1 ans (-0,7 mois).
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Le taux d’effort moyen recule de 0,2 pt à 30,7 %, tandis que la part des prêts dont le taux d’effort excède 35 % est quasi stable (+0,1 pt à 15,3 %).
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Le taux d’endettement comme la LTV moyenne s’inscrivent en baisse (respectivement -1,4 mois à 4,3 ans et -1,7 pts à 75,8 %).
Le marché français des crédits à l’habitat bénéficie de fondamentaux qui restent sains ; en particulier :
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ces crédits sont presque exclusivement octroyés à taux fixe (99 % de la production en moyenne en 2023), limitant ainsi les risques liés à la remontée des taux sur la solvabilité des emprunteurs (Graphique 16 et Graphique 17).
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la politique d’octroi repose en outre sur l’appréciation de la solvabilité de l’emprunteur et non sur la valeur de marché du bien financé, limitant ainsi les phénomènes d’amplification financière. L’encadrement du taux d’effort à l’octroi par le HCSF pour 80 % de la production permet en outre de limiter les pressions dans ce domaine.
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la quasi-totalité de l’encours (97 %) bénéficie d’une garantie, notamment de type caution ou hypothèque, permettant de limiter les pertes pour les banques en cas de défaut de l’ emprunteur (Graphique 19) ; la part de l’hypothèque est très minoritaire, ce qui réduit les risques pro-cycliques de contagion entre une éventuelle détérioration rapide de la solvabilité des emprunteurs et les prix de marché.
Au total, les risques demeurent contenus, comme en témoigne la faible sinistralité des crédits :
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les passages en défaut sur 12 mois ont représenté 0,44 % de l’encours au T4 2023, soit une quasi-stabilité (+0,04 pt par rapport au T4 2022 ; Graphique 48) ;
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le taux d’encours douteux est quasi stable à 0,97 % au 31 décembre 2023 (+0,02 pt par rapport au 31 décembre 2022) (Graphique 50). Sur la base de comparaisons internationales (exercice de transparence de l’Autorité Bancaire Européenne), le taux de défaut sur les crédits à l’habitat octroyés par les banques françaises se situe entre le premier quartile et la médiane (Graphique 51).
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le coût du risque reste très limité : il représente en 2023 1 point de base (bp) de l’encours moyen de crédits à l’habitat (Graphique 58).
Cette sinistralité réduite se reflète dans les taux de pondération mesurés par les modèles internes des banques pour le calcul de leur ratio de solvabilité. D’un niveau structurellement faible, les pondérations moyennes ont légèrement reculé (-0,4 pt sur 12 mois à 9,8 % en juin 2023). Afin de comparer ces pondérations moyennes avec d’autres marchés européens, il convient d’ajouter les exigences réglementaires applicables aux garants sur les mêmes encours. Un calcul partiel peut être réalisé en tenant compte de la couverture des risques par Crédit Logement, qui est également soumis à la réglementation prudentielle bancaire4 . Sur cette base, la pondération moyenne des encours de prêts à l’habitat octroyés par les banques françaises se situe entre la moyenne et la médiane des banques européennes, ce qui suggère qu’au total, la couverture en capital des crédits à l’habitat français est globalement comparable à celle observée dans les principaux autres pays européens (Graphique 59).
L’exploitation des reportings mis en place à la demande du HCSF pour suivre la tarification du crédit immobilier fait apparaître des marges à l’octroi, telles que déclarées par les établissements négatives mais qui se sont redressées en 2023 (Graphique 61). Cette évolution s’explique par la hausse plus marquée des taux des crédits octroyés, qui sont passés en moyenne de 1,79% au T4 2022 à 3,72% au T4 2023, soit une hausse de 1,93 pt, comparativement à celle du coût de refinancement mesuré sur la base des taux de cession interne (TCI), qui en moyenne est passé de 3,10% au T4 2022 à 4,08% au T4 2023, soit une hausse de 0,98 pt. Ce redressement s’est poursuivi au T1 2024 où l’on observe un retour à des marges à l’équilibre pour la première fois depuis 2 ans.
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Mise à jour le 8 Janvier 2025