• Entre le quatrième trimestre 2020 (T4-2020) et le T4-2021, l’indice INSEE des prix dans l’ancien a continué de progresser de 7,2 % en métropole, avec toutefois des divergences marquées entre la Province (+9 %) et l’Île-de-France (+2,7 %) tandis que les prix ont reculé à Paris (-1,6 % ; Graphique 1) ;

  • le nombre de transactions annuelles a atteint un nouveau pic à 1 178 000, soit une hausse de 15 % par rapport à 2020 et de 10,4 % par rapport à 2019 (Graphique 2) ;

  • la hausse des taux de marché ne s’est pas encore répercutée sur les taux des crédits à l’habitat, qui ont continué de baisser en 2021 pour atteindre un plus bas historique en décembre (1,06 % en moyenne) et ne remontent que très légèrement début 2022 (1,16 % en avril 2022 ; Graphique 3) ;

  • la production annuelle de crédits à l’habitat s’est élevée à 273,7 milliards d’euros en 2021, soit une hausse de 8,5 % par rapport à 2020 et de 11 % par rapport à 2019 (Graphique 5). Hors rachats et renégociations, la production de nouveaux crédits atteint même un plus haut historique de 224,8 milliards en 2021, tandis que la part des rachats et renégociations a reculé de 5,7 points à 17,9 % (Graphique 6). Dans le même temps, les encours de crédits à l’habitat ont enregistré une croissance de 6,8 % sur l’année (Graphique 7), tandis que les autres crédits aux particuliers n’ont progressé que de 1,1 %.

Cette dynamique soutenue du crédit immobilier a ainsi continué de contribuer à la hausse de l’endettement des ménages : en septembre 2021, celui-ci atteint 101,8 % du revenu disponible brut, un chiffre en hausse de 1,9 point par rapport à septembre 2020 et de 5,3 points par rapport à septembre 2019. Ce chiffre est supérieur à la moyenne de la zone euro (98,3 % ; +1,7 point par rapport à septembre 2020 et +4 points par rapport à septembre 2019).

Pour autant, la recommandation du Haut conseil de stabilité financière (HCSF) du 20 décembre 2019, amendée le 28 janvier 2021 puis transformée en mesure obligatoire le 29 septembre 2021, s’est traduite par une amélioration de plusieurs facteurs de risque.

Les données collectées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) montrent en effet la poursuite en 2021 de la baisse amorcée en 2020 de la part dans la production nouvelle des crédits les plus risqués :

  • La part des prêts dont la maturité excède 25 ans a reculé de 3,9 points à 6,8 % (Graphique 24) ;

  • la part des prêts dont le taux d’effort excède 35 % a reculé de 10,3 points à 19,1 % (Graphique 30). Le taux d’effort moyen a par ailleurs reculé de 0,5 point à 30,2 % (Graphique 26). La part des prêts dont le taux d’effort est compris entre 33 % et 35 %, qui constitue le plafond fixé par la mesure du HCSF, est toutefois passée de 8,8 % à 13,8 % (+5 points) ;

  • la part des prêts dont le rapport entre le montant et la valeur des biens financés à l'octroi (loan to value ou LTV) excède 100 % a reculé de 4,4 points à 24,6 % (Graphique 38). La LTV moyenne mesurée sur une année complète a par ailleurs reculé, passant de 84,4 % en 2020 à 83,3 % en 2021 (-1,1 point ; Graphique 34).

Ainsi, la part des prêts qui s’inscrivent au-delà des seuils fixés par la décision du HCSF s’élève à 14,2 % au premier trimestre 2022, un pourcentage qui s’inscrit à l’intérieur de la marge de flexibilité de 20 % admise par la décision (Graphique 40), tous les grands réseaux bancaires respectant individuellement ces exigences. Par ailleurs, les prêts ayant pour objet l’acquisition d’une résidence principale, que le HCSF a souhaité privilégier, restent largement prédominants : ils ont représenté 77 % des nouveaux crédits en 2021, en hausse de 1,3 point par rapport à 2020, notamment du fait de la hausse de la part des prêts aux primo-accédants (+1,2 point à 33 % ; Graphique 8).

En revanche, certaines caractéristiques des nouveaux prêts reflètent la hausse continue de l’endettement des emprunteurs ; ainsi entre 2020 et 2021 :

  • le montant moyen des prêts a augmenté de 5,4 % à 192 894 euros (Graphique 17) ; entre le T4-2020 et le T4-2021, il a même augmenté de 8,9 %, plus rapidement que les prix de l'immobilier (+7,2 %) ;

  • la durée moyenne a augmenté de 2,4 mois à 21,7 ans, l’allongement des maturités dans le respect du plafond de 25 ans facilitant le respect par les emprunteurs du taux d’effort maximal fixé par le HCSF (Graphique 20) ;

  • le taux d’endettement a augmenté de 1,4 mois à 5,2 années de revenus (Graphique 31).

Ces tendances se confirment généralement au début de l’année 2022. Ainsi, entre le T4-2021 et le T1-2022 (données trimestrielles) :

  • le montant moyen du prêt a augmenté de 1 % à 203 025 euros ;

  • la durée moyenne a augmenté de 1,8 mois à 22 ans ;

  • le taux d’effort a reculé de 0,2 point à 29,8 % ;

  • le taux d’endettement a augmenté de 0,3 mois à 5,2 années de revenus ;

  • la LTV moyenne a reculé de 0,3 point à 84,1 %.

Le modèle français d’octroi des crédits à l’habitat bénéficie de fondamentaux qui restent sains ; en particulier :

  1. ces crédits sont presque exclusivement octroyés à taux fixe (99,4 % de la production en 2021 et 97,3 % de l’encours en fin d’année), limitant ainsi les risques liés à la remontée des taux sur la solvabilité des emprunteurs (Graphique 11 et Graphique 12) ;

  2. la quasi-totalité de l’encours (96,6 %) bénéficie d’une protection, notamment de type caution ou hypothèque, permettant de limiter les pertes pour les banques en cas de défaut d’un emprunteur (Graphique 15) ;

  3. la politique d’octroi repose sur l’appréciation de la solvabilité de l’emprunteur, mesurée notamment à travers le taux d’effort à l’octroi, et non sur la valeur de marché du bien financé, limitant ainsi les phénomènes d’amplification financière.

Au total, les risques demeurent contenus, comme en témoigne la faible sinistralité des crédits :

  • les passages en défaut sur 12 mois ont représenté 0,36 % de l’encours au dernier trimestre 2021, un plus bas depuis fin 2015 (Graphique 44) ;

  • le taux d’encours douteux, bien qu’en hausse de 3 points de base par rapport à 2020 à 1,09 % au 31 décembre 2021, demeure faible (Graphique 46) ;

  • le coût du risque reste quant à lui très limité, à 1,3 points de base en 2021 (Graphique 53).

Cette sinistralité réduite observée historiquement se reflète dans les taux de pondération mesurés par les modèles internes des banques pour le calcul de leur ratio de solvabilité. D’un niveau structurellement faible, les pondérations moyennes ont baissé (-0,7 point sur 12 mois à 9,6 % en juin 2021). En tenant compte de la couverture des risques par Crédit Logement, lui-même soumis à la réglementation prudentielle bancaire, la pondération moyenne des encours de prêts à l’habitat octroyés par les banques françaises ressort dans la moyenne européenne (Graphique 56).

Enfin, le HCSF avait également souhaité attirer l’attention des établissements sur l’importance d’une tarification du crédit immobilier qui ne fragilise pas le modèle français de financement de l’habitat. L’exploitation des données communiquées à ce sujet par les établissements fait apparaître une compression des marges sur les nouveaux crédits en 2021, en raison d’un effet « ciseaux », engendré par la baisse des taux d’intérêt des crédits et la hausse du coût de refinancement mesuré sur la base des taux de cession interne (TCI). Cette tendance s’est accentuée au T1-2022 avec la forte remontée des taux de marché alors que les taux d’intérêt des nouveaux crédits sont restés relativement stables, entraînant même une marge nette négative observée sur la production du T1-2022 (Graphique 58). Si l’on tient toutefois compte, pour l’appréciation de la rentabilité globale des crédits à l’habitat, de divers revenus annexes (frais de dossier, commissions de distribution de contrats d’assurance, etc.), la marge mesurée sur la production nouvelle reste positive mais s’est également érodée au cours de l’année 2021.

L’ACPR restera donc vigilante à l’évolution de la rentabilité des crédits à l’habitat au cours des prochains mois dans un contexte qui devrait continuer de peser sur les marges : hausse probable des taux de marché et entrée en vigueur de la réforme de l’assurance emprunteur qui vise à renforcer la concurrence sur un produit largement distribué par les banques.

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Mise à jour le 9 Janvier 2025