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N° 162 : La situation des assureurs soumis à Solvabilité II en France fin 2023
La collecte nette en assurance-vie (hors épargne retraite et assurance-décès) est légèrement négative en 2023 (-2,3 Milliards d’euros) sous l’effet de l’accélération des rachats.
La collecte brute tous supports s’élève à 126,9 milliards d’euros en 2023 (cf. Graphique 1), soit +1,8 % par rapport à 2022, portée par la collecte sur les supports en euros qui s’établit à 72,9 milliards d’euros (+2,7 milliards d’euros /+3,8 %). La collecte sur les supports en unités de compte baisse légèrement à 54,0 milliards d’euros (-0,4 milliards d’euros / -0,7 %), après une année 2022 exceptionnelle. Bien que la collecte brute en 2023 soit la deuxième année de collecte la plus élevée depuis le début de la série en 2011, sa progression reste inférieure à celle des rachats qui augmentent de 16 % (+11 milliards d’euros) en 2023, en raison d’une forte accélération au premier semestre (+24,4 % au premier semestre par rapport à la même période en 2022) (cf. Graphique 2). Au total, les supports rachetables en assurance-vie enregistrent une légère décollecte nette de -2,3 milliards d’euros en 2023 après une collecte nette positive en 2022 (8,4 milliards d’euros).
La progression des rachats peut s’expliquer par la conjoncture économique (l’inflation, la hausse des taux d’intérêt et du coût de financement des prêts immobiliers) ainsi que par la concurrence des dépôts bancaires à terme pour lesquels les taux servis ont augmenté. Néanmoins, le ratio moyen rachats/primes reste contenu en 2023 et nettement inférieur au pic observé en 2012 (75 %). Les sinistres (45 milliards d’euros) augmentent plus modérément (+ 1,5 milliard d’euros ; soit +3 % sur toute l’année et en moyenne +3 % par an depuis 2011) sous l’effet notamment du vieillissement de la population (c. Graphique 3).
La situation des supports euros contraste avec celle des supports UC. En effet, la décollecte nette sur les supports euros d’un montant de -33,4 milliards d’euros accélère en 2023 (-3,5 milliards d’euros), en raison de la hausse des rachats sur ce support (+5,2 milliards d’euros, +9 %) par rapport à 2022. La collecte nette des supports UC reste positive (31,1 milliards d’euros en 2023) en dépit d’une progression des rachats (+6,3 milliards d’euros, +41 %) mais recule de 18 % après une année exceptionnelle en 2022 (cf. Graphique 5). Les supports en unités de compte tirent également leur dynamisme des arbitrages qui leur sont largement favorables (cf. Graphique 4), avec un transfert en 2023 d’un montant de 5,1 milliards d’euros.
L’activité d’assurance non vie progresse significativement en 2023.
Les primes acquises d’assurance non vie en affaires directes ont augmenté de 5,9 % entre 2022 et 2023 et les sinistres d’assurance non vie en affaires directes ont augmenté de 3,9 % sur la même période (cf. Tableau 2). Ces hausses s’inscrivent dans une tendance de long terme : entre 2018 et 2023, les primes ont augmenté de 29 % et les sinistres de 35 % (cf. Graphique 6). Les primes de réassurance non vie continuent également leur progression (+2,0 % entre 2022 et 2023), mais le montant des sinistres acceptés en réassurance marque un premier recul après plusieurs années d’augmentation. La hausse du montant des primes en affaires directes s’observe sur la totalité des lignes d’activité entre 2022 et 2023 (cf. Tableau 3). Pour ce qui est des sinistres en affaires directes, ils augmentent pour la plupart des lignes d’activité, mais une légère diminution (- 0,3 %) est observée pour l’assurance automobile (cf. Tableau 4). L’activité santé en affaires directes progresse quant à elle de manière équivalente en termes de primes et de sinistres (+6,1 % pour les primes et les sinistres de frais médicaux).
Le ratio combiné de l’ensemble des lignes d’activité non vie s’établit à 98,1 % fin 2023, alors qu’il était de 99,6 % fin 2022 (cf. Graphique 7). Cette amélioration, que l’on observe également sur le ratio combiné non vie hors santé, (101 % fin 2023 contre 103 % fin 2022) est notamment portée par l’assurance automobile. En effet, cette ligne d’activité a un poids significatif dans l’assurance non vie, or elle a vu le montant de ses primes augmenter contrairement à celui de ses sinistres entre 2022 et 2023. Le ratio combiné des frais médicaux, qui représentent 72,4 % des primes de la santé non vie en 2023 (et 79,6 % des sinistres) s’améliore également : il s’établit à 100,6 % fin 2023, après 101,1 % fin 2022.
Le coût des sinistres d’incendies et autres dommages aux biens est en nette progression depuis début 2018, porté par l’inflation et par la répétition de catastrophes naturelles.
Le coût des sinistres d’incendies et autres dommages aux biens est passé de 10,7 milliards d’euros en 2018 à 16,9 milliards d’euros en 2023, soit une augmentation de 58 % en 5 ans (cf. Graphique 8 et Tableau 5). Cette ligne d’activité regroupe tout dommage subi par des biens matériels à la suite de divers événements tels qu’un vol, un incendie, une explosion, une tempête, une chute de grêle, un gel, un affaissement de terrain ou une catastrophe naturelle. La hausse des prix constatée depuis début 2021 (cf. Graphique 9) est venue gonfler le montant des remboursements liés aux dommages aux biens, notamment entre 2021 et 2022. En juin 2023, des émeutes et des violences urbaines ont généré des sinistres évalués à 793 millions d’euros, selon le bilan dressé par la mission d’information du Sénat. Mais surtout, les catastrophes naturelles sont de plus en plus fréquentes et coûteuses ces dernières années. Les sinistres liés aux catastrophes naturelles ont plus que doublés depuis 2018, atteignant 3,3 milliards d’euros en 2023 (cf. Graphique 10), pire année observée depuis 1999. Une mission, confiée à trois experts par le Ministre de l’Économie et par le Ministre de la Transition Écologique, a fourni des pistes de changements à opérer en termes de prévention, de tarification et d’assurabilité de ces évènements. Ces changements s’inscrivent dans un défi global d’adaptation au changement climatique. Dans ce contexte, le ministère de l’Économie a décidé une augmentation de la surprime « catastrophe naturelle » appliquée aux contrats d’assurance auto, habitation, et biens professionnels, à partir du 1er janvier 2025.
L’allocation de l’actif des assureurs a peu évolué au 2e semestre 2023.
Les placements des organismes d'assurance français s’élèvent à 2 582 milliards d'euros en valeur de marché fin 2023, en hausse de 1,9 % par rapport au semestre précédent (2 534 milliards d’euros) et en hausse de 4,5 % par rapport à fin juin 2022 (2 471 milliards d’euros). Ceci reflète en partie des effets de valorisation liés à la baisse des taux d’intérêt entre ces dates et à la hausse des marchés d’actions. Après les évolutions importantes de certaines classes d’actifs au cours de l’année 2022 en raison de la remontée des taux et de la volatilité sur les marchés actions, l’allocation observée sur les actifs des assureurs à la fin de l’année 2023 diffère peu de celle de fin juin 2023. Les obligations souveraines représentent 20 % des placements après mise en transparence, les obligations du secteur financier 27 % et les obligations des sociétés non financières 11 % (contre respectivement 21 %, 26 % et 11 %) (cf. Graphique 13). Les assureurs continuent par ailleurs de privilégier des contreparties principalement situées en France ou dans la zone euro (cf. Graphique 14). Une telle stratégie d’allocation d’actifs leur permet de disposer d’une part très importante d’actifs liquides et de bonne qualité (45 %) (cf. Graphique 15).
Avec le retour de l’inflation et la remontée des taux, les assureurs ont par ailleurs accru leur trésorerie et leurs dépôts bancaires (cf. Graphique 16).
Du fait de la légère baisse des taux d’intérêt au 4e trimestre 2023, les obligations sont en situation de moins-value latente de l’ordre de seulement -4 % en moyenne à la fin de l’année 2023 contre -8 % à la fin d’année 2022. Des plus-values latentes sont toujours constatées sur les actions (+32 %) et l’immobilier (+25 %) (contre respectivement 30 % et 33 %) (cf. Graphique 17).
Par ailleurs, le niveau plus élevé des taux d’intérêt par rapport à la période de taux bas permet aux assureurs de réinvestir le nominal des obligations acquises pendant cette période et arrivées à maturité sur des titres offrant des rendements plus élevés. L’amélioration du rendement du portefeuille est progressive à mesure que de nouveaux titres remplacent ceux qui ont été acquis ces dernières années. Ainsi, la part des encours dont les coupons sont compris entre 3 % et 4 % augmente significativement (+3 points passant de 9 % à 12 %) entre fin 2022 et fin 2023 au détriment des autres coupons, notamment les coupons inférieurs à 2 % dont la part n’augmente plus (cf. Graphique 18).
Le taux de couverture du Capital de Solvabilité Requis (CSR) évolue différemment selon le type d’organisme entre 2022 et 2023 et est globalement stable pour l’ensemble des organismes.
Le ratio de solvabilité de l’ensemble des organismes d’assurance s’établit à 249 % en 2023. Il est en légère diminution au 2e semestre de l’année 2023, mais relativement stable pour l’ensemble de l’année puisqu’il s’établissait à 247 % en 2022 (cf. Graphique 19). Toutefois, la situation diffère selon le type d’organisme : les organismes vie et mixtes voient leur ratio de solvabilité augmenter entre 2022 et 2023 de 12 points de pourcentages, alors que les organismes non vie voient leur ratio de solvabilité baisser de 6 points de pourcentages (cf. Graphiques 20 et 21). Les bancassureurs, qui regroupent des organismes d’assurance vie et mixtes ainsi que des organismes d’assurance non vie, ont vu leur ratio de solvabilité augmenter de 10 points de pourcentage entre 2022 et 2023, du fait de la forte prépondérance de l’activité vie. L’augmentation du ratio de solvabilité des organismes vie et mixtes est portée par le numérateur : les fonds propres éligibles à la couverture du CSR augmentent de 6,7 milliards d’euros entre 2022 et 2023, alors que le CSR n’augmente que de 500 millions d’euros environ (cf. Graphique 22). C’est en particulier la réserve de réconciliation qui augmente entre 2022 et 2023 pour les organismes vie et mixtes, sa part dans les fonds propres étant passée de 69 % en 2022 à 72 % en 2022 (cf. Compléments techniques).
L’augmentation du ratio de solvabilité des bancassureurs est quant à elle portée par le dénominateur : le CSR diminue de 4,4 % entre 2022 et 2023, alors que les fonds propres diminuent de seulement 0,3 %. C’est le risque de marché, constituant l’un des modules du CSR, qui a significativement diminué pour les bancassureurs (– 2,7 milliards d’euros entre 2022 et 2023). En ce qui concerne les organismes non vie, la dégradation du ratio de solvabilité est induite par le CSR, qui augmente plus fortement (3,2 %) que les fonds propres (1,2 %) entre 2022 et 2023. L’augmentation du CSR des organismes non vie est due à une hausse du risque de souscription entre 2022 et 2023, liée à la hausse des provisions et de la sinistralité. Ce montant, qui intervient dans le calcul du CSR agrégé sur tous les organismes en tant que module « souscription non-vie », est passé de 15,4 milliards d’euros en 2022 à 17,5 milliards d’euros en 2023.
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Mise à jour le 8 Janvier 2025