Une entité est considérée défaillante si elle se trouve ou s’il existe des éléments objectifs montrant qu’elle est susceptible de se trouver, à terme rapproché (failing or likely to fail – FOLFT), dans l’une ou l’autre des situations suivantes :

  • Elle ne respecte plus les exigences prudentielles qui s’imposent à elle.
  • Elle n’est pas en mesure d’assurer ses paiements.
  • La valeur de son actif est inférieure à la valeur de son passif.
  • Elle requiert un soutien financier exceptionnel des pouvoirs publics.

Si l’autorité de résolution estime que l’entité est défaillante ou susceptible de le devenir, qu’il n’existe pas de solution alternative au financement par le secteur privé (comme une recapitalisation) et qu’une mesure de résolution est nécessaire au regard de l’intérêt général, l’entité concernée fait l’objet d’une procédure de résolution, laquelle apparaît donc comme un régime d’exception par rapport à la liquidation judiciaire qui est le régime de droit commun. L’autorité de résolution doit alors prendre le contrôle de l’entité en résolution (directement ou par l’intermédiaire d’un administrateur spécial).

L’évaluation de l’intérêt général considèrera notamment le besoin de maintenir des fonctions exercées par l’entité dites « critiques », c’est-à-dire permettant le bon fonctionnement de l’économie dans un ou plusieurs États membres – un des objectifs de la résolution.

Pour le secteur bancaire

Dans l’Union bancaire, la mise en œuvre de ce cadre opérationnel est définie par une directive établissant le rétablissement et la résolution des banques (bank recovery and resolution directive – BRRD) et un règlement qui instaure une centralisation européenne des missions de la résolution et la création d’un Mécanisme unique de résolution (MRU), en particulier pour les États-membres de la zone euro (Single resolution mechanism regulation – SRMR).

Le Conseil de résolution unique (CRU) est ainsi l’autorité compétente pour les questions relatives aux établissements de crédit dits « importants » (significant institution – SI) ou des autres établissements de crédit moins importants mais ayant une filiale d'établissement de crédit dans un autre pays de l’Union bancaire. La mise en œuvre de ses décisions relève des Autorités de résolution nationales (ARN). En revanche, les autorités de résolution nationales prennent les décisions relatives aux établissements de crédit moins importants (less significant institutions – LSI), sous le contrôle indirect du CRU.

La résolution des établissements de crédit importants est planifiée au sein d’équipes de résolution conjointes (internal resolution teams – IRT), coordonnées par le CRU et auxquelles participent les ARN concernées. Les travaux de préparation de la résolution couvrent plusieurs thématiques visant à assurer la résolvabilité de la banque en cas de défaillance :

  • La gouvernance.
  • Les capacités d’absorption et de recapitalisation.
  • La liquidité en résolution.
  • La continuité opérationnelle et l’accès aux infrastructures de marché.
  • Les systèmes d’information, la production de données et la valorisation.
  • La communication externe.
  • La séparabilité et la réorganisation post résolution.

Dans le cadre du dispositif préventif bancaire, l’autorité de résolution détermine un montant minimal de fonds propres et de passifs éligibles (minimum requirement of own funds and eligible liabilities – MREL). L’exigence de MREL vise à garantir la possibilité de mettre en œuvre un renflouement interne (ou bail-in) de la banque en cas de résolution, en l’obligeant à maintenir une capacité suffisante d’absorption des pertes et de recapitalisation, aisément mobilisable. Le niveau de MREL ne peut être inférieur à l’exigence de fonds propres prudentiels.

En cas de défaillance d’une banque, l’autorité de résolution dispose de quatre principaux outils de résolution, trois outils dits de transfert ainsi que le renflouement interne, qu’elle peut décider d’appliquer conjointement ou séparément en fonction de la situation :

  • La cession d’activité : l’autorité de résolution peut procéder au transfert des actions et autres titres de propriété ainsi que des biens, droits et obligations de l’entité soumise à une procédure de résolution à un acquéreur privé.
  • L’outil de séparation des actifs : l’autorité de résolution peut créer une structure de gestion d’actifs à laquelle elle transfère les biens, droits et obligations de mauvaise qualité de l’entité soumise à une procédure de résolution et qui ont vocation à être vendus ou liquidés en minimisant la destruction de valeur. Cette structure est couramment assimilée à une « bad bank ».
  • L’établissement-relais : l’autorité peut transférer à cet établissement les actions et autres titres de propriété ainsi que des biens, droits et obligations de l’entité soumise à une procédure de résolution et qui ont vocation à perdurer (fonctions critiques). Cet établissement est couramment assimilé à une « good bank ».
  • Le renflouement interne : il permet de faire contribuer les actionnaires et créanciers à l’absorption des pertes et, le cas échéant, à la recapitalisation de l’entité en résolution. Il se divise en deux phases : une phase de réduction des fonds propres et engagements éligibles afin d’absorber les pertes et de ramener la valeur nette comptable de l’établissement à zéro ; une phase de conversion des engagements éligibles afin de recapitaliser l’établissement. Les déposants disposent d’une protection en cas d’application du renflouement interne. La mise en œuvre de cet instrument est réalisée par l’ARN. À ce titre, l’ACPR a publié un guide opérationnel sur la mise en œuvre du renflouement interne en France.

À l’exception de l’instrument de séparation des actifs qui s’utilise uniquement en combinaison avec un, autre outil, l’autorité de résolution peut décider d’appliquer les outils de résolution de façon séparée ou combinée.

Protection des déposants en liquidation et résolution

Lorsqu’une mesure de résolution bancaire est décidée par l’autorité de résolution, le cadre règlementaire européen, c’est-à-dire la directive sur le redressement et la résolution des banques n° 2014/59/UE (banking recovery and resolution directive – BRRD) prévoit des mesures de protection des déposants.

Si l’autorité de résolution décide qu’il n’est pas dans l’intérêt général de résoudre l’établissement concerné, ce dernier sera liquidé selon les procédures d’insolvabilité nationale. Les déposants seront alors protégés à hauteur d’un montant égal à 100 000 euros, couverts par le dispositif de garantie des dépôts. Ce montant peut par ailleurs être rehaussé, jusqu’à 500 000 euros, pour les dépôts exceptionnels temporaires encaissés moins de trois mois avant la défaillance de la banque. Les dépôts concernés doivent provenir : de la vente d’un bien d’habitation appartenant au déposant ; de la réparation en capital d’un dommage subi par le déposant ; du versement en capital d’un avantage retraite, d’une succession, d’un legs, ou d’une donation ; d’une prestation compensatoire, d’une indemnité transactionnelle ou contractuelle consécutive à la rupture d’un contrat de travail.

Ce dispositif mobilise un fonds préalablement constitué par les contributions des établissements de crédit et dont la gestion est assurée par le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR). Ce dernier dispose d’un délai de sept jours ouvrables pour indemniser les déposants concernés.

Par ailleurs, les déposants profitent d’un rang privilégié (par palier) dans la hiérarchie des créanciers, par rapport aux créanciers ordinaires, pour le remboursement de leurs créances. Ainsi, le rang concernant le montant couvert par la garantie des dépôts (100 000 euros) est suivi d’un rang pour le montant excédant ce seuil. Le produit de la liquidation peut donc conduire à une indemnisation supérieure à la couverture de 100 000 euros.

Si l’autorité de résolution considère que l’établissement ne peut être liquidé et doit faire l’objet de mesures de résolution, elle peut décider d’appliquer le renflouement interne afin de faire absorber les pertes et de reconstituer les fonds propres par les actionnaires et les créanciers de la banque.

Bien que les déposants constituent des créanciers pour l’établissement, ils disposent ici aussi d’une protection particulière.

Tout d’abord, en résolution, les dépôts couverts (soit jusqu’à 100 000 euros, avec les mêmes rehaussements exceptionnels qu’en liquidation) sont exclus de toute mesure de renflouement interne.

Ensuite, le renflouement interne doit également respecter la hiérarchie des créanciers, les dépôts non exclus du renflouement interne (dépôts non couverts) ne pouvant absorber des pertes qu’après les détenteurs de titres de capital (fonds propres) et de dette. Les déposants ne seront donc sollicités qu’en tout dernier ressort en cas de résolution.

Enfin, le cadre de résolution établit une règle stricte suivant laquelle aucun déposant ne pourrait supporter des pertes supérieures à celles qu’il aurait subies si l’établissement avait été mis en faillite (no creditor worse-off than in liquidation – NCWO).

Pour le secteur assurantiel

Le volet préventif du régime français (rédaction d’un plan préventif de rétablissement par les organismes d’assurance et d’un plan préventif de résolution par l’autorité de résolution) s’applique d’office aux organismes et groupes dont le total des actifs a dépassé au moins une fois au cours des trois derniers exercices le seuil de 50 milliards d’euros. Le Collège de supervision de l’ACPR peut décider d’étendre ces obligations au cas par cas à d’autres organismes exerçant des fonctions critiques.

La planification de la résolution des organismes d’assurance concernés couvre un ensemble de thématiques visant à assurer la résolvabilité de ces entités, développées dans les plans préventifs de résolution, notamment :

  • L’identification des fonctions critiques.
  • L’analyse des interconnexions.
  • La définition d’une stratégie de résolution en cas de défaillance.
  • L’opérationnalisation des outils de résolution.

Le Collège de résolution dispose de plusieurs pouvoirs de résolution pouvant être exercés de manière séparée ou combinée : en premier lieu des pouvoirs de police administrative (notamment désigner un administrateur de résolution, restreindre certaines activités – y compris accepter la souscription de nouvelles polices, restreindre les rachats) ; en second lieu des pouvoirs de transfert de portefeuille, qui peuvent être mis en œuvre au moyen de trois outils) :

  • Le transfert d’office d’un portefeuille : cet outil consiste à céder un portefeuille de contrats d’assurance, d’opération ou de bulletin d’adhésion à des contrats ou règlement d’un organisme défaillant à un autre organisme d’assurance. Il peut s’accompagner d’un transfert d’actifs sur décision du Collège de résolution. Ce transfert décidé par le Collège de résolution intervient après injonction à l’organisme de transférer tout ou partie de son portefeuille dans un délai minimum d'un mois.
  • L’établissement-relais : création d’une structure ad hoc destinée à recueillir, de manière temporaire et dans une perspective finale de revente, tout ou partie des engagements et des actifs d’un organisme en résolution.
  • La structure de gestion de passifs (fiducie) : cet outil consiste à mettre en place une structure de gestion de passifs sous la forme d’un patrimoine fiduciaire, ayant pour vocation de gérer les engagements d’assurance reçus en gestion extinctive et jusqu’à épuisement. La fiducie est constituée par l'organisme défaillant et gérée par un ou plusieurs assureurs qui sont à la fois les fiduciaires et les bénéficiaires de la fiducie mais sont sans lien avec l'organisme en résolution.

Pour les contreparties centrales

Le cadre européen de résolution des contreparties centrales (central counterparties – CCP) vise à prendre en compte les spécificités des CCP, infrastructures de marché fortement systémiques, notamment la concentration du marché ou l’absence ou quasi-absence de dette au bilan.

Comme pour les entités bancaires et assurantielles, ce cadre implique que les autorités de résolution conduisent des travaux de préparation visant à assurer la résolvabilité de la CCP concernée en cas de défaillance et à maintenir ses fonctions considérées comme critiques. Il permet également à l’autorité de résolution de disposer d’outils de résolution adaptés si une telle défaillance survenait :

  • Le pouvoir de mettre fin aux contrats : l’autorité de résolution peut mettre fin aux contrats conclus entre la CCP et l’adhérent compensateur défaillant, à ceux liés à un service ou une classe d’actifs donnée ou à tous les contrats de la CCP en résolution.
  • La décote sur les marges variables dues par la CCP : il consiste à réduire les montants auxquels ont droit, en remboursement de la part de la CCP, les adhérents compensateurs non défaillants ayant enregistré des baisses des marges variables qu’ils détiennent auprès de la CCP.
  • L’appel de liquidité : il permet à l’autorité de résolution d’obliger les adhérents compensateurs non défaillants à verser une contribution en numéraire à la CCP.
  • La dépréciation et conversion des titres de propriété et des instruments de dettes : elle permet de faire contribuer les actionnaires et créanciers à l’absorption des pertes et, le cas échéant, à la recapitalisation de l’entité en résolution. Il se divise en deux phases : une phase de réduction des fonds propres et des engagements non garantis afin d’absorber les pertes et de ramener la valeur nette comptable de la CCP à zéro ; une phase de conversion des engagements non garantis afin de recapitaliser la CCP.
  • La cession d’actifs : l’autorité peut procéder au transfert des actions et autres titres de propriété ainsi que des biens, droits et obligations de la CCP soumise à une procédure de résolution à un acquéreur privé.
  • La CCP-relais : création d’une structure ad hoc destinée à recueillir, de manière temporaire et dans une perspective finale de revente, tout ou partie des engagements et des actifs d’une CCP en résolution.

Mise à jour le 19 Décembre 2024