Le volume de transactions dans l’ancien, principal segment du marché, enregistre ainsi de nouveau une croissance positive (+2,1 %) et la production de crédits à l’habitat aux particuliers a enregistré un fort rebond (+56 %). Cette dernière tendance reflète toutefois un volume inédit de rachats de crédits externes, qui ont concentré 18,1 % de la production en 2013. Dans ce contexte, les encours de crédits ont affiché une progression qui reste relativement modeste au regard de sa tendance de long terme (+3,9 %).

Le marché présente de façon générale des fondamentaux qui restent solides, s’agissant en particulier de la solvabilité des emprunteurs, qui constitue le principal critère d’octroi, même si certains indicateurs se stabilisent à des niveaux qui restent élevés :

  • la durée initiale des prêts s’est réduite par rapport à 2012, pour s’établir à 19,1 ans, de même que la maturité résiduelle moyenne de l’encours, revenue de 15,4 ans à 15,3 ans ;

  • la part dans la production des emprunteurs affichant un taux d’effort (i.e. ratio de charges de remboursement/revenu) de 35 % et plus s’est de nouveau réduite en 2013, tout comme le taux d’effort moyen, qui, à 30 %, enregistre sa plus forte baisse depuis 2001, même s’il reste encore sensiblement supérieur au niveau atteint à cette date (27,6 %) ;

  • la part de la production réalisée à taux fixe s’est encore légèrement accrue pour atteindre 92,8 %, ces mêmes crédits continuant de concentrer la très grande majorité des encours (83,2%) ; les prêts à taux variable « sec » (c’est-à-dire sans limitation de la progression du taux d’intérêt - « cap »), qui présentent le risque le plus élevé pour les emprunteurs, ne s’élèvent qu’à 4,8 % de l’encours fin 2013 ; enfin, les prêts à remboursement in fine ne représentent qu’une part infime de la production (0,3 % en 2013) ;

  • la quasi-totalité de l‘encours de prêts à l’habitat bénéficie d’une garantie, réelle (hypothèque ou privilège de prêteur de deniers) ou accordée par un établissement de crédit ou un organisme d’assurance ;

  • le coût du risque des crédits à l’habitat aux particuliers, qui avait légèrement progressé en 2012, s’est de nouveau replié à 0,065 % des encours.

Quelques évolutions attirent néanmoins l’attention, même si certaines d’entre elles suggèrent une modification de la structure de la clientèle au bénéfice des emprunteurs disposant de revenus et/ou d’un patrimoine relativement plus élevés que la moyenne :

  • le montant moyen des prêts a continué de progresser en 2013 en dépit d’une baisse des prix immobiliers qui touche désormais l’ensemble de la France ; par ailleurs, après s’être contractée en 2012, la « loan to value » (LTV) moyenne à l’octroi, qui rapporte le montant du prêt à la valeur du bien financé, a enregistré un rebond de plus de 4 points, à 84,1 %, son plus haut niveau depuis 2001 ; cependant, ces deux tendances ne se sont pas accompagnées d’une hausse du taux d’effort moyen (cf. supra) ; en outre, la forte progression de la LTV moyenne à l’octroi tient pour partie à l’enregistrement inadéquat des rachats de crédits externes par certaines banques (cf. infra ; par ailleurs, la LTV en cours de vie de l’encours de prêts peut être estimée à un peu plus de 56 % à fin 2013, stable par rapport à 2012) ;

  • le taux de crédits douteux bruts sur les crédits à l’habitat aux particuliers a continué de progresser en 2013 pour atteindre un peu moins de 1,5 %, mais il reste encore sensiblement plus faible que pour l’ensemble des crédits à la clientèle (3,8 %), qui ont en outre enregistré une augmentation beaucoup plus forte par rapport à 2012 ; les taux d’encours douteux varient toutefois fortement d’un segment à l’autre, les primo-accédants affichant notamment désormais le taux d’encours douteux le plus élevé (2,8 %) ;

  • dans le même temps, le taux de provisionnement s’est stabilisé autour de 27 %, un niveau toujours significativement plus faible que pour l’ensemble des crédits à la clientèle (55,4 %) mais qui semble cohérent avec l’importance des garanties dont bénéficient les banques ;

  • si les banques bénéficient de la protection relativement bonne des emprunteurs face au risque de décès ou d’incapacité de travail, elles sont en revanche exposées au risque de chômage prolongé, seule une faible proportion de leurs clients ayant souscrit une assurance perte d’emploi.

Dans ce contexte, la forte croissance des rachats de crédits externes constitue un point d’attention majeur : ces opérations, dont l’objectif sous-jacent est de fidéliser la clientèle et d’accroître la collecte de dépôts auprès des particuliers paraît difficilement soutenable sur le long terme compte tenu d’un volume d’épargne total qui reste relativement fini, ne doivent pas donner lieu à une sous-estimation du risque de crédit des emprunteurs, qui doit rester correctement reflété dans les taux qui sont pratiqués sur les crédits ; par ailleurs, l’enquête de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a fait apparaître que plusieurs banques ne procédaient pas à la valorisation des biens sous-jacents au moment de l’émission des nouveaux crédits, ce qui ne paraît pas conforme à une bonne appréciation des risques et doit être corrigé. Plus généralement, même si, au niveau agrégé, la valeur des biens financés paraît à ce jour excéder largement le capital restant dû des crédits, il importe que les banques soient en mesure de procéder à une évaluation régulière de leurs garanties réelles tout au long de la vie des prêts afin d’être en mesure d’anticiper tout retournement brutal du marché immobilier résidentiel.

Enfin, si la baisse des prix de l’immobilier et le maintien des taux des crédits à des niveaux historiquement bas ont nourri une certains reprise de l’activité sur la période récente, la persistance de conditions macroéconomiques peu porteuses doit inciter les banques françaises au maintien d’une surveillance rapprochée de l’évolution des risques de leurs portefeuilles de crédits à l’habitat aux particuliers.

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Mise à jour le 23 Janvier 2025