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N° 114 : Le financement de l’habitat en 2019
Dans un environnement où les taux d’intérêt ont à nouveau baissé pour atteindre des plus bas historiques, le marché de l’immobilier résidentiel a été très dynamique en France en 2019 : le nombre de transactions a atteint un nouveau pic historique de 1 065 000 ventes, tandis que l’indice INSEE des prix dans l’ancien a progressé de 3,8 % en métropole (+4 % en Île-de-France et +3,6 % en Province).
Dans cet environnement, la production annuelle de crédits à l’habitat s’est élevée à 246,4 milliards d’euros en 2019, soit une hausse de 21,3 % par rapport à 2018. Dans le même temps, les encours de crédits à l’habitat ont enregistré sur l’année une croissance de 6,8 %.
Le modèle français des crédits à l’habitat repose sur trois piliers :
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ces crédits sont presque exclusivement octroyés à taux fixe (98,5 % de la production en 2019), limitant ainsi les risques liés à une éventuelle remontée des taux pour les ménages ;
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la quasi-totalité de l’encours (97,3 %) bénéficie d’une protection, notamment de type caution ou hypothèque, permettant de limiter les pertes pour les banques en cas de défaut d’un emprunteur ;
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la politique d’octroi reste principalement basée sur l’appréciation de la solvabilité de l’emprunteur, mesurée notamment à l’aide du taux d’effort à l’octroi (debt service to income ou DSTI), et non sur la valeur de marché du bien financé.
En dépit de fondamentaux qui restent sains, l’évolution des conditions d’emprunt immobilier des ménages en France constitue un sujet de préoccupation pour la stabilité financière. Tandis que l’endettement des ménages français a augmenté de 1,9 point de pourcentage (pt) à 61,6 % du Produit intérieur brut en 2019, on observe parallèlement, tout comme en 2017 et en 2018, une poursuite du relâchement des conditions d’emprunt des ménages. Ainsi :
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Le prêt moyen à l’octroi a augmenté de manière quasi ininterrompue depuis 2009 pour s’établir à 179 026 euros en 2019, en hausse de 5,2 % par rapport à 2018, supérieure à celle des prix de l’immobilier.
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La durée moyenne des prêts à l’octroi a continué d’augmenter pour la quatrième année consécutive. Elle dépasse son niveau de 2008 à 20,3 ans, en augmentation de 4 mois par rapport à 2018.
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Le taux d’effort moyen à l’octroi s’inscrit en légère hausse pour la quatrième année consécutive, pour atteindre 30,3 % en 2019 mais reste toujours en-deçà du niveau de 2009 (31,6 %). Par ailleurs, la part dans la production des emprunteurs dont le taux d’effort est supérieur à 35 % a progressé de 1,2 pt à 26,1 %.
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Le taux d’endettement moyen à l’octroi a également augmenté pour la quatrième année consécutive pour atteindre 5,4 ans en 2019 (+2 mois par rapport à 2018), son plus haut niveau depuis 2004.
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Enfin, le rapport entre le montant des prêts et la valeur des biens financés à l’octroi (loan to value ou LTV) a augmenté pour la cinquième année consécutive (+1,5 pt), pour atteindre 88,8 %, son plus haut niveau depuis 2001. Toutefois, la quasi-totalité des prêts étant amortissables et les prix de l’immobilier restant orientés à la hausse, la LTV moyenne en cours de vie est plus faible que la LTV moyenne à l’octroi et demeure relativement stable depuis 2016, aux alentours de 73 %.
C’est dans ce contexte que le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) a émis le 20 décembre 2019 une recommandation visant à limiter le taux d’effort à l’octroi à 33 % et la maturité à l’octroi à 25 ans des crédits immobiliers octroyés en France. La mise en œuvre de cette recommandation fera l’objet d’un suivi statistique par un état dédié « CREDITHAB » réaménagé par l’instruction ACPR n°2020-I-02, et dont les premières remises sont attendues pour septembre 2020.
Il reste que les risques semblent contenus, comme en témoignent la faible sinistralité des crédits, tant en termes de stock (taux d’encours douteux de 1,3 % au 31 décembre 2019, en baisse de 4 points de base (bps) par rapport à 2018) qu’en termes de flux (les passages en défaut sur 12 mois ont représenté 0,71 % de l’encours au premier trimestre 2020, un plus bas depuis mi-2015). Le coût du risque reste quant à lui négligeable, à 2 bps en 2019, en-dessous de sa moyenne depuis 2006 (4 bps). Cette sinistralité réduite se reflète dans les taux de pondération faibles qui continuent de baisser (-0,4 pt sur 12 mois à 10,9 % en juin 2019) mais restent dans la norme par rapport à l’ensemble des pays couverts par l’exercice de transparence de l’Autorité bancaire européenne (European Banking Authority - EBA), en particulier lorsqu’on tient compte de la couverture des risques par les organismes de caution.
Cependant, en dépit de la stabilité du coût moyen du passif et de la légère baisse du taux de frais généraux, le taux de marge nette de l’encours de crédits à l’habitat a continué à se dégrader en 2019 sous l’effet de la baisse rapide du taux d’intérêt moyen perçu (de 2 % en décembre 2018 à 1,8 % en décembre 2019) et de l’intensité de la concurrence sur ce marché. Les taux à la production restant inférieurs au taux moyen de l’encours, le renouvellement du stock de crédits devrait continuer à réduire le taux d’intérêt moyen de l’encours, exerçant une pression supplémentaire à la baisse sur les marges. C’est dans ce contexte que le HCSF a également souhaité attirer l’attention des établissements de crédit sur l’importance d’une tarification du crédit immobilier qui ne fragilise pas le modèle français de financement de l’habitat. À cet effet, le nouveau reporting « RENT_IMMO » mis en place par l’instruction ACPR n° 2020-I-04 et dont les premières remises sont attendues en septembre 2020, permettra de s’assurer de la bonne couverture des coûts et des risques.
En raison du contexte sanitaire, le début de l’année 2020 est marqué par une forte baisse du nombre de transactions immobilières à partir de la mise en place des mesures de confinement. Si la production mensuelle de crédit a été très soutenue en janvier (+33,7 % par rapport à janvier 2019) et février (+41,8 %), elle a ralenti à 7,6 % en mars, puis à 10,9 % en avril. Dans le même temps, on a pu observer une forte hausse des rachats et des renégociations de crédits, qui augmentent de 126 % sur les 4 premiers mois de 2020 et dont la part dans la production mensuelle passe de 25,4 % en décembre 2019 à 47,1 % en avril 2020. En excluant ces rachats et renégociations, la production mensuelle s’inscrirait en baisse de 6,1 % en mars et de 28,9 % en avril. Ces nouveaux prêts, qui correspondent pour l’essentiel à des opérations initiées commercialement en fin d’année 2019, ne permettent pas encore d’observer l’incidence de la recommandation formulée par le HCSF.
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Updated on the 17th of January 2025